Commission des droits de l’Homme de l’ONU àGenève
Cuba, le Honduras et l’histoire d’un terroriste notoire devenu diplomate étasunien
par Salim Lamrani
Article publié le 29 avril 2004

Le Honduras a finalement accepté de présenter la résolution annuelle contre Cuba - proposée par le Sous-secrétaire des affaires politiques du département d’Etat étasunien M. Marc Grossman àun certain nombre de pays latino-américains - àla soixantième conférence de la Commission des droits de l’Homme de Genève, le 1er avril 2004.

Le projet en question, ayant pour but de stigmatiser le gouvernement de La Havane, n’a été approuvé que par une marge très étroite (22 votes contre 21), le 15 avril 2004, par les membres de la Commission, malgré les vigoureuses
pressions exercées par Washington. [1] Dix pays, parmi lesquels l’Argentine, le Brésil et le Paraguay, ont choisi de s’abstenir, considérant la motion annuelle comme étant une simple lutte politique instrumentée par les Etats-Unis.

La décision prise par les autorités honduriennes, en plus de se prêter àla stratégie agressive étasunienne contre la population cubaine, et de favoriser le climat de perpétuelle désinformation envers la réalité de l’Ile, soulève de sérieuses questions d’ordre déontologique. [2]

Il est intéressant d’étudier le panorama social d’un pays comme le Honduras qui prétend asseoir Cuba au banc des accusés sur la question de droits de l’homme. Au-delàdes conséquences politiques qu’une telle soumission àune manoeuvre impériale peut engendrer, évoquons la situation interne de cette nation.

Selon le dernier rapport de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPAL), de novembre 2003,
77,3% des Honduriens vivent dans la pauvreté, alors que 54,4% se trouvent dans l’indigence la plus totale. [3]

Le coefficient de Gini, qui mesure le niveau d’égalitarisme au sein de la société, est de 0,59 point, ce qui fait du Honduras la société la plus inégalitaire d’Amérique latine après le Brésil. [4] 38,9% des enfants de moins de cinq ans souffrent de malnutrition chronique. En dépit de cette situation, les dépenses publiques pour les services sociaux sont seulement de 77 dollars par an et par habitant, ce qui
place le Honduras àla pénultième place du continent latino-américain (la moyenne de l’Amérique latine est de 540 dollars). [5] Selon la dernière étude de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le taux de mortalité infantile atteint le chiffre de 38 pour mille naissances. [6]

Loin d’essayer de régler les graves problèmes auxquels se
heurtent ses concitoyens, le gouvernement du Président Ricardo Maduro préfère présenter une résolution contre Cuba.

Selon le rapport 2003 d’Amnesty International, au Honduras, plusieurs dizaines d’enfants et de jeunes ont été tués dans des circonstances laissant àpenser qu’il s’agissait d’exécutions extrajudiciaires. Cette année encore, des défenseurs des droits humains ont été victimes d’atteintes àleurs libertés fondamentales. Selon des témoignages, des policiers ont fait usage de la force contre des manifestants (.).

Selon Casa Alianza, une ONG qui s’occupe des enfants des rues et qui s’est penchée sur ces cas, quelque 1 500 enfants et jeunes ont été tués depuis 1998, dont 556 dans la seule année 2002 (.). En janvier, le Commissaire national pour la protection des droits humains a publié un (.) rapport préliminaire sur la mort violente de garçons, de filles et d’adolescents au Honduras. [Ce] rapport a rejeté l’explication selon laquelle ces morts résulteraient de violences entre bandes ; il a en revanche accrédité la thèse selon laquelle elles seraient le résultat d’une entreprise de « purification sociale  ». Il a aussi établi que la majorité des victimes n’ avaient pas d’antécédents judiciaires (.).

L’étude de la rapporteuse spéciale des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires concernant sa visite au Honduras en 2001 a été rendu public en octobre. Dans ses observations finales, la rapporteuse spéciale indique que « des enfants ont été tués par des membres des forces de sécurité  » et que, dans nombre de cas, les victimes n’étaient pas armées et n’avaient donné aux policiers aucune raison d’employer la force. [7]

Un rapport de Casa Alianza - une ONG qui s’occupe de la protection des droits des jeunes et des enfants en Amérique centrale -, qui vient d’être déposé auprès de la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH), rapporte que 159 jeunes de moins de 23 ans ont été assassinés dans des
centres de détention au Honduras entre mai 2002 et mars 2004, parmi lesquels 41 ont été exécutés de manière extrajudiciaire. Selon l’organisation, les organes de la sécurité de l’Etat sont responsables de 69% des crimes. [8] M. Ricardo Maduro, violations des droits de l’homme ? Vous avez dit violations des droits de l’homme ? [9]

L’archevêque de Tegucigalpa, capitale du pays, le cardinal Oscar Rodriguez, a regretté l’attitude de son gouvernement. Selon ses dires, les droits de l’homme sont violés quotidiennement au Honduras, car il y a des communautés, en plein 21ème siècle, qui manquent d’électricité, d’eau et de
voies de communications. Il a également déploré le fait que M. Ricardo Maduro accepte de se plier àla politique anti-cubaine de Washington, afin d’intégrer la liste des nations bénéficiant du fonds « Défi du Millénaire  », créé par les Etats-Unis àl’intention des pays les plus pauvres, et doté de 3,5 milliards de dollars. [10] Le congressiste républicain étasunien Cass Bellenger, qui s’est rendu au Honduras pour rencontrer le président Maduro, s’est empressé de le féliciter pour son dévouement àla cause de son pays, en affirmant que les Etats-Unis sauraient remercier le gouvernement hondurien. [11]

Peu avant le vote, l’ombudsman hondurien Ramon Custodio avait questionné l’autorité morale du président Maduro pour présenter une motion sur la situation des droits de l’homme dans la plus grande île des Antilles, en faisant référence àun rapport de l’organisation Transparency International qui considère le Honduras comme l’un des pays les plus corrompus du monde et où les exécutions extrajudiciaires sont monnaie courante. « Le Honduras se prête ànouveau aux manipulations pour agresser un pays dont les enfants ne souffrent point de malnutrition et ne meurent pas de faim  » a-t-il souligné. [12]

Plusieurs pays d’Amérique latine n’ont pas pu résister àl’influence coercitive exercée par les autorités étasuniennes et ont apporté leur appui au projet.

Parmi ceux-ci se trouvent le Chili, le Costa Rica, le
Guatemala, le Honduras, le Pérou, la République Dominicaine et - fait plus étonnant - le Mexique. Le gouvernement mexicain a même subi l’humiliation politique de voir le porte-parole de la Maison Blanche, M. Scott McClellan, se prononcer àsa place et déclarer publiquement, le 13 avril 2004, suite àune conversation téléphonique entre le président mexicain M. Vicente Fox et M. George W. Bush, que le Mexique soutiendrait la résolution àGenève. A cette date, la diplomatie mexicaine n’avait pas encore rendu publique sa décision. Malgré le démenti de Mexico, le vote a montré que les incessantes pressions de Washington ont substantiellement écorné la souveraineté décisionnelle de cette nation, traitée lors de cette occasion comme une vulgaire république bananière. [13]

Pour ce qui est des autres pays tels que le Chili, le Guatemala, le Pérou et la République Dominicaine, un simple coup d’oeil au rapport annuel de 2003 du Département d’Etat sur les droits de l’homme, éminemment conservateur avec ses alliés, et àla dernière étude de la CEPAL, porterait àémettre de sérieuses réserves quant àla validité éthique d’un jugement contre Cuba, en matière de droits de l’homme. Les différences au niveau du développement humain entre Cuba et ces nations sont encore plus éloquentes, mais apparemment, dans la realpolitik, la base factuelle ne mérite que très peu de considération. [14]

Cependant, certains gouvernements latino-américains comme l’Argentine, le Brésil et le Paraguay refusèrent de se prêter àla politique de confrontation orchestrée par les Etats-Unis. Le président du Paraguay M. Nicanor Duarte Frutos a déclaré au journal Ultima Hora de Montevideo qu’il avait rejeté la demande personnelle du président Bush de soutenir la résolution contre Cuba. Il est probable que la décision du gouvernement paraguayen sera, d’une manière ou d’une autre, sanctionnée par les Etats-Unis. [15] Des sources diplomatiques àGenève ont rapporté que les membres de la délégation étasunienne avaient menacé les représentants des pays africains, arabes, asiatiques et latino-américains de mettre leur veto aux crédits que le Fonds monétaire international (FMI) devait leur accorder, s’ils ne votaient pas en faveur de la motion. [16]

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Une information d’une importance capitale concernant la délégation diplomatique étasunienne a été révélée et, conformément àune pratique désormais institutionnelle, immédiatement censurée par une grande majorité de la presse internationale. M. Luis Zúñiga Rey, un membre officiel
du corps diplomatique de l’administration Bush auprès des Nations unies, d’origine cubaine, a participé activement, par le passé, àl’organisation d’attentats terroristes contre Cuba. Cette incroyable nouvelle provient d’un rapport de la Commission des droits de l’homme de l’ONU, datant du 21 décembre 1999 et effectué par le rapporteur spécial M. Enrique Bernales Ballesteros. [17]

Le passé de M. Luis Zúñiga Rey est révélateur. Après avoir quitté Cuba de manière clandestine par la base navale étasunienne de Guantanamo, il rejoignit Miami où il s’engagea auprès de la CIA pour mener des opérations d’infiltration en territoire cubain et perpétrer des attentats et des sabotages contre les structures économiques vitales du pays. En aoà»t 1974, il fut arrêté par les autorités cubaines, convaincu de terrorisme et de port illégal d’armes et d’explosifs et condamné àvingt-cinq années de réclusion criminelle. Libéré au bout de quatorze ans en 1988, il retourna aux Etats-Unis et fit partie de la Fondation nationale cubano-américaine (FNCA). Cette importante organisation terroriste, composée d’extrémistes liés àl’ancienne dictature de Batista, est responsable de nombreuses attaques paramilitaires contre les civils cubains. En 1997, il fut impliqué dans la sanglante vague d’attentats terroristes qui frappa les infrastructures touristiques cubaines et qui eut un écho international seulement parce qu’un touriste italien y perdit la vie. Les autres 300 attentats dont a été victime Cuba ont été passés sous silence, impératifs politiques obligent. [18]

L’étude minutieuse de M. Enrique Bernales Ballesteros révèle les différentes activités organisées par M. Luis Posada Carriles, l’un des plus sanglants terroristes de l’hémisphère américain, longtemps financé par la FNCA, et aujourd’hui incarcéré au Panama pour tentative d’assassinat et activités terroristes. Le rapport souligne également que M. Luis Zúñiga Rey, actuellement membre de la délégation étasunienne àGenève, avait fait partie du Frente Nacional Cubano, groupe paramilitaire responsable de plusieurs attaques et sabotages contre Cuba. Aucun organisme de la presse internationale n’a jugé cette information digne d’intérêt. [19]

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Récemment, l’organisation Reporters sans frontières (RSF) a
lancé une campagne destinée àdissuader les touristes de se rendre àCuba et ainsi affecter un secteur essentiel de son économie. Cette action entre dans la lignée de la politique étasunienne qui consiste àasphyxier la population cubaine.

L’opération de RSF est loin d’être anodine et n’est que la
continuation d’un long processus d’intoxication médiatique lancé depuis quelques années et accentué depuis mars 2003, lors de l’arrestation d’agents stipendiés par les Etats-Unis, déguisés en « militants des droits de l’homme  » et en « journalistes indépendants  ».

La nouvelle initiative de RSF, qui consiste àdemander ouvertement le départ d’un chef d’Etat sous le slogan « Cuba sí, Castro no  », complètement hors des prérogatives d’une entité qui se prétend défendre la « liberté de la presse  », peut surprendre si l’on daigne accorder une quelconque légitimité àl’organisation de M. Ménard. Mais lorsqu’il apparaît que celle-ci se réunit régulièrement avec la frange extrémiste de l’exil cubain de Miami, responsable de nombreuses agressions terroristes contre le peuple cubain, et qu’elle poursuit le même agenda impérial, tout devient très clair. [20]

Il convient de rappeler qui étaient les personnes que RSF
qualifie de « journalistes, [d’]opposants et [de] défenseurs des droits de l’ homme  » condamnées «  pour avoir osé parler de démocratie  ». Contrairement aux propos calomnieux de RSF, les différents accusés n’ont pas été jugés pour leurs pensées hétérodoxes mais pour avoir collaboré avec les Etats-Unis, la puissance étrangère d’une capacité militaire inouïe qui assiège Cuba depuis 1959 au moyen de sanctions économiques, d’attentats terroristes et d’intenses campagnes de désinformation. [21]

En mars 2003, 87 personnes furent arrêtées pour conspiration, activités subversives et collaboration avec la mise en place du blocus imposé par Washington.

Parmi ces individus se trouvaient infiltrés douze agents de la sécurité de l’Etat cubain dont Nestor Baguer, considéré comme l’un des plus prééminents leaders de la dissidence par la presse internationale et les organisations non gouvernementales, jusqu’àce qu’il révèle sa véritable identité. Il était, en réalité, l’agent Octavio de la Sécurité de l’Etat depuis 1962 et avait infiltré depuis 1992 les différentes organisations de «  militants des droits de l’homme  », financées par les Etats-Unis. De plus, il était le correspondant privilégié de RSF àCuba. M. Ménard, honteux de s’être laissé berné de la sorte, a passé cette information sous silence mais n’en démord pas, et persiste àqualifier ces gens « d’intellectuels  » ou de « 
poète[s]  ». [22] Dans une récente interview, il a même brisé les frontières du grotesque en osant affirmer, le plus sérieusement du monde, que « parmi les chefs d’accusation, on trouv[ait] le fait de posséder du papier blanc et des stylos  ». [23] Heureusement, le ridicule ne tue point.

Evoquons àprésent le cas des 75 personnes (74 hommes et une
femme) mises sous les verrous par la justice cubaine.

80% des 54 avocats de la défense ont été choisis par les accusés ou leurs familles, soit 44 d’entres eux. Les dix autres furent nommés d’office car certains inculpés ne souhaitaient pas se désigner un avocat. Il y eut 29 procès publics àcomparution immédiate qui, s’ils réduisent les délais d’instruction, en aucun cas ne limitent les garanties constitutionnelles, auxquels participèrent plus de 3 000 personnes. Les prévenus firent appel à28 témoins parmi lesquels 22 purent s’exprimer en leur faveur. Tous les accusés jouirent du droit de faire appel de la décision rendue par le tribunal depremière instance. Actuellement, une dizaine de cas sont en cours d’examen par la Tribunal suprême. Voilàles procès que RSF et une partie de la presse
internationale qualifient de « stalinien[s]  ». Certains accusés se trouvaient en possession de plus de 16 000 dollars en liquide. Pour évaluer l’importance de la somme, il sied de rappeler que le salaire mensuel d’un ministre àCuba est de 50 dollars. Sur les 75 personnes, seules quatre d’ entre elles disposaient d’un emploi. Ces « mercenaires  », ainsi sont-ils qualifiés par les autorités cubaines, recevaient une rémunération moyenne de 3 000 dollars par mois réglée par les Etats-Unis, au travers de l’organisme US/AID. Cela est durement sanctionné par la législation cubaine, qui condamne la collaboration avec une puissance étrangère, surtout si l’argent provient d’un gouvernement qui tente, depuis plus de 45 ans, de renverser le président de la République cubaine, M. Fidel Castro, et de détruire la Révolution. [24]

Quant aux statuts d’intellectuels, de journalistes et de poètes que RSF et les transnationales de l’information ont octroyés aux 75 personnes incarcérées, il est légitime de signaler, sans volonté aucune de s’enfermer dans des concepts élitistes, que seules 25 d’entres-elles disposent d’un diplôme universitaire. Le reste n’a jamais effectué d’études supérieures. Parmi ces 25 éléments, seuls deux avaient un statut de journaliste : MM.Raúl Rivero et Julio César Gálvez.

En outre, quinze d’entre eux possédaient déjàun casier judiciaire, soit 20% du total : un fut condamné pour homicide, trois pour viol ou abus lascif de mineurs, deux pour attentat, un pour vol àmain armée, un pour trafic de drogue, quatre pour délits économiques, un pour vol, deux pour troubles de l’ordre public.

Dans un but de transformer, pour des raisons hautement doctrinales, ces individus en « prisonniers de conscience  », ce socle factuel a totalement disparu de l’espace médiatique public, qui prône pourtant la transmission d’une information complète et non déformée. [25]

Les lourdes peines prononcées àl’encontre des accusés vont six à28 ans de privation de liberté mais, contrairement àune idée reçue, la loi cubaine n’ est pas plus sévère que le code pénal français.

Si des citoyens français avaient eu les mêmes agissements, dans un contexte géopolitique similaire, ils auraient risqué de fortes peines de prison. En effet, l’article 411-4 de la législation pénale française stipule que :

Le fait d’entretenir des intelligences avec une puissance étrangère, avec une entreprise ou une organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou avec leurs agents, en vue de susciter des hostilités ou des actes d’agression contre la France, est puni de trente ans de détention criminelle et de 450 000 euros d’amende.

Est puni des mêmes peines le fait de fournir àune puissance étrangère, àune entreprise ou une organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou àleurs agents les moyens d’entreprendre des hostilités ou d’accomplir des actes d’
agression contre la France.
 [26]

Si la France avait condamné des individus coupables des mêmes actes que les 75 criminels cubains, elle n’aurait, àjuste titre, déclenché aucun tollé international. Il doit en être de même pour Cuba.

En outre, M. James Cason, Chef de la Section des intérêts étasuniens (SINA) àLa Havane, indiquait personnellement les directives àsuivre aux « dissidents  ». En décembre 2002, il a publiquement déclaré, lors d’une interview avec la télévision de Miami : « chaque fois que je voyage àMiami je tiens àme réunir et je me réunis avec tous les groupes, la Fondation nationale cubano-américaine [et] le Conseil pour la liberté de Cuba  », deux organisations connues pour leur implication dans le terrorisme international. Il a également souligné que son but était fédérer les groupes d’opposition autour d’un « accord sur dix points  », c’est-à-dire un parti unique de la subversion. Pourquoi donc transformer des agents au service d’une puissance étrangère en « militants des droits de l’homme  » et « journalistes  », si ce n’est que pour des impératifs propagandistes, destinés àpoursuivre la guerre que les Etats-Unis mènent contre Cuba depuis plus de
quatre décennies ? [27]

Le cinéaste hollywoodien Oliver Stone, de renommée
internationale, a réalisé, suite àune commande de la chaîne étasunienne HBO, un documentaire sur M. Fidel Castro. HBO, qui est réputée pour son audace dans ses programmes de diffusion et pour le peu de cas qu’elle accorde aux pressions politiques, a dà» annuler la transmission du travail cinématographique de M. Stone, suite au lobbying féroce exercé par la partie extrémiste de la communauté cubaine de Floride et ses alliés politiques. Le documentaire laissait transparaître une image non biaisée de la société cubaine. Suite àcette décision, Oliver Stone, désabusé, faisait la déclaration suivante :

Les Américains ont une vision de Castro qui est malheureusement caricaturale (.). Je pense qu’ils craignent de le trouver sympathique (.). J’ai vu les gens àCuba. Je n’ai pas vu un régime stalinien, la Corée du Nord ou l’Irak.
Arrêtons de nous raconter des sornettes, des millions de touristes s’y rendent chaque année, y compris des Canadiens, ils voient la réalité de leurs propres yeux. Cela en devient ridicule (.). J’ai visité de nombreux pays : le Honduras, le Guatemala, le Chili, le Brésil, l’Argentine. Je ne vois pas en quoi ils sont si libres. Je ne saisis pas la différence et je ne comprends pas pourquoi Cuba est le croque-mitaine. Je serais beaucoup plus terrifié àl’idée de vivre au Guatemala ou carrément dans certains coins de New York, de Los Angeles ou de Washington, qu’àLa Havane. Je pense que c’
est un endroit très sà»r. Il y a très peu de criminalité (.).

[Cuba] c’est comme le Vietnam, cela représente une défaite pour nous. Ils ont refusé de se rendre. Castro a été plus malin que nous, la révolution a survécu, il a pris le contrôle de la terre. Prendre le contrôle de la terre est le plus grand des péchés en Amérique. Nous ne tolérons pas les révolutions - bien que nous ayons connu une révolution. Nous n’en avons pas terminé avec la destruction de la Révolution bolchevique de 1918 et je pense que tout ce qui pourrait exister en marge de notre structure financière
globalisée deviendra l’ennemi. Et Cuba est sur la liste (.).

Dans chaque rue que nous avons parcourue [avec Castro], il y avait un débordement, une excitation, les gens se précipitaient pour le voir, faisaient la queue, et je pense que nous aurions pu parcourir vingt rues et nous aurions rencontré le même type de réaction.  [28]

Cuba doit faire face àl’incessante agression étasunienne. Dernièrement, un candidat républicain au Sénat, Bill McCollum a proposé un plan « pour ramener la démocratie àCuba  » qui inclut «  l’infiltration d’espions parmi les touristes étrangers  ». Le rôle de ces individus serait de fomenter une subversion interne en recrutant des « dissidents  », déstabiliser le pays et, si possible, créer les conditions qui mèneraient vers une possible confrontation militaire entre La Havane et Washington.

Notes :

[1Commission des droits de l’homme de Genève, «  Document de presse. La Commission décide de nommer des rapporteurs spéciaux sur la République
populaire démocratique de Corée et le Bélarus  »
, 15 avril 2004. www.unog.ch(site consulté le 17 avril 2004) ; The Miami Herald, « Cuba’s Human Rights Record Censured ; Activist Punched  », 16 avril 2004. www.miami.com (site consulté le 16 avril 2004).

[2El Nuevo Herald, « Honduras presenta en la ONU la moción sobre derechos  », 7 avril 2004. www.miami.com (site consulté le 7 avril 2004).

[3Comisión Económica para América Latina y el Caribe (CEPAL), Síntesis - Panorama Social de América Latina 2002-2003, (Mexico, Novembre 2003), pp.8-9.

[4Ibid, p.12. Le coefficient de Gini permet de calculer le niveau d’égalitarisme d’une nation. Plus celui-ci s’approchera de 0 et plus le pays tendra vers l’égalitarisme et plus il s’approchera de 1 plus la société sera inégalitaire.

[5Ibid, pp. 15, 27.

[6Food and Agriculture Organization of the United Nations (FAO), The State of Food Insecurity in the World 2003 (Rome : FAO, 2003), p. 35. Voir également le rapport du PNUD pour le Honduras : Programa de las Naciones Unidas para el Desarrollo, «  Informe sobre Desarrollo Humano Honduras
2002  »
, 2002. www.undp.un.hn(site consulté le 14 avril 2004).

[7Amnesty International, « Honduras. Rapport 2003  », 2003. http://web.amnesty.org (site consulté le 7 avril 2004).

[8Adital, « Entidad denuncia ejecuciones de jóvenes en cárceles hondureñas  », 7 avril 2004. www.adital.org.br (site consulté le 8 avril 2004).

[9Voir également : Percy Francisco Alvarado Godoy, « Toda la verdad sobre Honduras, el actual acusador de Cuba en la Comisión de Derechos Humanos en Ginebra  », Rebelión, 4 avril 2004. www.rebelion.org (site consulté le 6 avril 2004).

[10Radio Habana Cuba (RHC), « L’archevêque de Tegucigalpa déplore la décision du Honduras de présenter àla CDH la résolution anti-cubaine  », 7 avril 2004. www.radiohc.cu (site consulté le 7 avril 2004).

[11El Nuevo Herald, « Honduras no cederá a presiones de Cuba  », 14 avril 2004. www.miami.com (site consulté
le 15 avril 2004).

[12La Jornada, « Se consuma la condena a Cuba  », 16 avril 2004. www.jornada.unam.mx (site consulté le 16 avril 2004).

[13Granma, « La Casa Blanca anunció que México apoyará resolución contra
Cuba  »
, 14 avril 2004. www.granma.cu (site consulté le 15 avril 2004).

[14Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor, « Country Reports on Human Rights Practices 2003 : Peru  », Department of State, 25 février 2004. www.state.gov (site consulté le 16 avril 2004) ; Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor, « Country Reports on
Human Rights Practices 2003 : Chile  »
, Department of State, 25 février 2004. www.state.gov(site consulté le 16 avril
2004) ; Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor, « Country Reports on Human Rights Practices 2003 : Dominican Republic  », Department of State, 25 février 2004. www.state.gov(site consulté le 16 avril 2004) ; Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor, « Country Reports on Human Rights Practices 2003 : Guatemala  », Department of State, 25 février 2004. www.state.gov (site consulté
le 16 avril 2004) ; Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor, « Country Reports on Human Rights Practices 2003 : Mexico  », Department of State, 25 février 2004. www.state.gov (site consulté le
16 avril 2004) ; Comisión Económica para América Latina y el Caribe (CEPAL), Síntesis - Panorama Social de América Latina 2002-2003, op.cit.

[15Pablo Alfonso, « La ONU vota contra Castro  », El Nuevo Herald, 16 avril 2004. www.miami.com( site consulté le 16 avril 2004).

[16La Jornada, op. cit.

[17Enrique Bernales Ballesteros, « Le Droit des peuples àdisposer d’
eux-mêmes et son application aux peuples assujettis àune domination coloniale ou étrangère ou àl’occupation étrangère  »
, Commission des droits de l’homme, Cinquante-sixième session, Point 5 de l’ordre du jour provisoire, Nations unies, 21 décembre 1999 : 16-25. www.unhchr.ch (site consulté le 2 avril 2004).

[18Orlando Requeijo Gual, « Un terroriste dans la délégation des Etats-Unis àGenève  », Granma Internacional, 31 mars 2004. www.granmai.cubasi.cu (site consulté le 6 avril 2004) ; Rosa Miriam Elizalde & Luis Baez, "Los Disidentes" (La Havane : Editora Política, 2003), p. 186.

[19Enrique Bernales Ballesteros, op. cit. : 16.

[20Reporters sans frontières, « Le Comité de soutien àRaúl Rivero distribue des livres aux touristes en partance pour Cuba  », 27 mars 2004. www.rsf.org (site consulté le 2 avril 2004). Pour ce qui est des liens entre RSF et l’extrême droite cubaine de Miami voir : Salim Lamrani, « Reporters sans frontières et la droite radicale de
Floride : une alliance au grand jour  »
, RISAL, 2 février 2004. http://risal.collectifs.net (site consulté le 20
mars 2004).

[21«  Désinformer, explique Philippe Breton, c’est couvrir un mensonge avec
les habits de la vérité. En démocratie, où les entreprises manipulatoires sont légion, le désinformation est la reine des techniques visant àtromper l’opinion  »
in Ignacio Ramonet, La Tyrannie de la communication (1999. Paris
 : Editions Galilée, 2001), pp.135-36.

[22Reporters sans frontières, op. cit. ; Rosa Miriam Elizalde & Luis Baez, « The Dissidents  » (La Havane : Editora Política, 2003), pp. 153-74.

[23Claire Cousin, « RSF s’attaque au Lider maximo  », Métro, 2 avril 2004 : 14.

[24Felipe Pérez Roque, « Conferencia a la prensa nacional y extranjera  », MINREX, 25 mars 2004 : 5-7.

[25Ibid : 8.

[26Code Pénal français, Livre IV, Titre 1er , Chapitre I, Article 411-4, (Ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000, art.3, Journal Officiel du 22
septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002).

[27Felipe Pérez Roque, Nous ne comptons pas renoncer ànotre souveraineté, Conférence de presse offerte par le ministre des relations extérieures de la
République de Cuba le 9 avril 2003. (La Havane : Editora Política, 2003) pp. 8-9.

[28Simon Houpt, «  The Americans Have a View of Castro that is Unfortunately
Rigid.I Think they’re Worried they Might Like Him  »
, Globe and Mail, 20 mars 2004 : R1. www.globeandmail.com (site consulté le 23 mars 2004).

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