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Forum Social Mondial 2003
Préoccupation face au comportement des médias privés vénézuéliens

Un jury d’experts internationaux présidé par le Prix Nobel de la Paix Perez Esquivel et par Walden Bello, membre du Comité International du Forum Social Mondial, a exprimé sa préoccupation face au comportement des médias commerciaux vénézuéliens et a demandé l’ouverture d’un processus d’enquête àCaracas les 11, 12 et 13 avril 2003.

28 janvier 2003

Dans le cadre du Forum Social Mondial, une audience publique sur les médias privés vénézueliens s’est déroulée le 27 janvier àPorto Alegre, au Brésil, a l’initiative de l’ONG Media Watch Global.

Un jury d’experts internationaux de la communication composé de Tariq Ali, Gianni Mina, Naomi Klein, Steve Rendall et Daniel Herz, présidé par le Prix Nobel de la Paix Adolfo Perez Esquivel et par Walden Bello, membre du Comité International du Forum Social Mondial, a entendu et interrogé six témoins. Après une introduction historique des professeurs Earle Herrera et Luis Brito Garcia, les témoins, s’appuyant sur des projections vidéo, ont décrit comment les médias privés vénézueliens ont créé les conditions du coup d’Etat du 11 avril 2002 contre le président constitutionnel Hugo Chávez, comment ils ont fabriqué son prétexte visuel, comment ils ont promu le gouvernement putschiste, allant jusqu’àoccuper certains de ses postes, comment ils ont dénoncé et lynché les personnes considérées comme sympathisantes du président, comment ils ont imposé le black-out au moment où la population s’est révoltée. Andrés Izarra, ex-directeur d’information du canal RCTV, a raconté sa démission en plein coup d’Etat face àla décision de sa chaîne de censurer toute expression ou image "chavistes".

Les autres témoins ont expliqué comment depuis le rétablissement de la démocratie les mêmes medias privés continuent àconspirer àtravers la manipulation subliminale, l’incitation àla haine sociale et raciale, la propagande guerrière, l’appel incessant àignorer les institutions démocratiques et àrenverser de nouveau le gouvernement constitutionnel. Le dirigeant paysan Braulio à lvarez a détaille comment les medias assimilent les paysans àdes terroristes et àdes envahisseurs pour justifier la répression des bénéficiaires de la nouvelle Loi des Terres. Une représentante indienne a dénoncé pour sa part le dénigrement permanent des siens, traités par les radio et télévision privées d’« animaux » payés avec des "mandarines et des bananes" par le président Chávez. La jeune directrice de Catia Tve Blanca Eekhout, une des télévisions communautaires les plus importantes du Venezuela, a rapporté la dénonciation par le réseau afro-américain du Venezuela des campagnes racistes permanentes des médias privés. Au nom de l’Asociación Nacional de Medios Comunitarios, Alternativos y Libres, Gabriela Fuentes a explique que la délation par ces médias prives de "ceux qui portent des caméras miniatures" s’est traduite par des agressions répétées contre les journalistes des communautés populaires. Comme exemple de non-professionnalisme, Ignacio Ramonet, directeur du Monde Diplomatique, a narré le cas d’une fausse interview dans laquelle il critique durement le président Chavez, publiée par le journal d’opposition El Nacional. Pour Gabriel Prioli, universitaire et spécialiste en télévision publique et éducative du Gouvernement Federal du Brésil, le comportement des médias privés au Venezuela est motif de honte pour tous les journalistes non seulement en Amérique Latine mais dans le reste du monde. Giani Mina, journaliste italien, a critiqué la pression médiatique qui s’exerce sur le Venezuela au plan international.

Au terme de la session chacun des jurés a formulé ses observations et ses recommandations.

Tariq Ali a dit que le monopole médiatique au Venezuela était politiquement corrompu et qu’il fallait le casser. Les ONGs de défense des droits de l’Homme, selon Naomi Klein, se centrent trop sur les restrictions imposées par l’Etat et devraient s’occuper davantage de la concentration croissante des médias entre les mains de groupes transnationaux. Steve Rendall, de la puissante organisation nord-americaine FAIR (Fairness and Accuracy in Reporting) s’est opposé àla fermeture de chaînes mais a souhaité que des mesures soient prises contre ces médias qui appuient des coups d’Etat et la violence, ainsi que le ferait n’importe quel pays. Aucune attaque contre la presse, a-t-il declaré, ne doit être tolérée, ce qui signifie qu’il faut aussi écouter les dénonciations des médias communautaires. Avec les autres jurés, Rendall a recommandé que l’enquête se poursuive en avril àCaracas et certains ont d’ores et déjàexprimé leur intention de s’entretenir avec des propriétaires et des directeurs de médias commerciaux afin de mieux comprendre comment ont pu se produire de tels faits. Quant àDaniel Herz, du Conseil National de Communication Sociale et de la Federation des Journalistes du Brésil il a affirmé qu’au Venezuela les médias commerciaux ont pris en otage la souveraineté populaire. Il a mis l’accent sur la nécessité d’un contrôle public des médias et sur le renforcement parallèle d’un secteur de médias communautaires.


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Source : AMCLA & ATTAC Venezuela 2003.

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